Pas grand chose, du moins.

On ne sait rien de l’intention des pierres dont on cerne comme on peut l’existence par un jeu de causalités mécaniques et chimiques ; débris, pièces détachées de phénomènes géologiques faits de sédimentation, de tectonique et d’érosion. On ne sait rien de leur volonté ni de leurs élans ; de leurs craintes. On devine à peine leur patience.
On peut se rassurer de définitions, formules dont c’est d’ailleurs le rôle. Faire entrer, pragmatique, l’objet dans un système. Et détourner les yeux pour ne manipuler plus que cette abstraction, comme on fait des données. Reste le petit volume, exilé comme nous autres, du grand tout ; l’existence têtue qui pèse de son propre poids sur le sol qui la porte et qui, un peu comme les grandes masses le font à l’échelle de l’univers, courbe à sa manière l’espace à la façon d’un nœud sur une corde, d’un accroc dans un tissus, une tâche sur un mur, un fruit dans un filet à provisions, ou un oiseau traversant l’étendue du ciel.
Si elles cachent la face sur laquelle elles sont assises, toutes les autres qu’elle a, compliquées encore de multiples creux et reliefs, la font nue dans le vent. Sait-on alors ses frissons intimes ? Sa vulnérabilité ? Les arrangements qui sont les siens avec les vastitudes, le tumulte ou le silence en lesquels trempe son âme ?
Envisage-t-on ce que c’est d’être un œil dans la nuit, tâtant de toute sa surface l’impalpable milieu dans lequel elle a lieu ? Sait-on ce que c’est pour elles que l’expérience du corps ?

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