(une image s’avance)

Rien, après l’acquisition du langage au moins, et même certainement avant, dès l’apparition confuse encore d’une conscience primitive dans la vie embryonnaire, ne se donne nu, dans son éblouissement premier, insulaire, mat. Une reconnaissance partielle, un écho, un vague appariement, une simple comparaison même disposent chaque expérience dans un champ où mutuellement elles se renseignent, s’amarrent, s’intercalent, se juxtaposent, s’apprivoisent ou se toisent. En vérité chaque image se formant, chaque son et chaque odeur, chaque texture, chaque profération, chaque événement est hanté. Ils adviennent dans une série dont le point d’entrée, mal localisable, ne connait de témoin que le corps dans sa forme de conscience antérieure à celle qui côtoie le langage et qui ne se laisse alors verbaliser. S’avancent au mieux les mots  » sentiment  » ou  » sensation  » quand la conscience seconde, par un pas de côté, tente de se formuler ce qu’elle surprend passer en elle. Mais l’essentiel agit bien plus profondément, dans des lieux non éclairés. Cette manière de mise en réseau laisse entrevoir alors un sujet élargi.
Alors, disons simplement : une image s’avance, apparait, s’établi ou à lieu. Et que manifeste cette structuration, sinon que quelques dépôts ont ici été excités par une résonance latente ? Qu’une formule s’est en sous-mains mobilisée, à la manière d’un précipité chimique ou sous l’effet d’un principe de capillarité ? L’image ne sourd pas depuis son horizon lointain comme on hèle un passant, pas plus qu’elle n’est projetée par une imagination créatrice modelant ce qu’elle trouve à sa disposition. Elle est ce point de contact où deux temps entrent en résonance. Où deux tonalités s’ajustent en perspective.

0 commentaires

Soumettre un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *


1 + sept =