2012 – Portrait, par Philippe Piguetin L’oeil n°651.
« On n’est jamais à savoir si l’on doit s’accorder au tumulte du monde, en adopter la confusion, en rejoindre l’agitation et les passades, s’y fondre et s’y couler ou y opposer le regard stable, intemporel, droit et glacé de celui qui passe outre. » Jérémy Liron n’est pas seulement peintre, il écrit aussi – et de fort belle manière. Comme il peint. Originaire de Marseille, installé à Lyon, la trentaine entamée, ancien élève de Bustamante aux Beaux-Arts de Paris, Liron a jeté son dévolu sur le monde urbain. Celui qui l’entoure. Parce que, comme il l’écrit encore : « Une chose est sûre : jamais on n’échappe au contexte ; on ne peut parler que depuis là où, dans l’espace et dans le temps, on se trouve. » Justement, le temps suspendu, l’espace fragmenté, ce sont là les vecteurs directeurs de sa peinture. Une peinture qui procède du silence, façon nature morte de Chardin, et qui donne à voir des compositions puissamment architecturées. Présentés sous plexiglas, comme pour les mettre à distance, ses tableaux peints à l’huile sur toile déclinent tout un monde d’arrêts sur image qui en dit long de l’influence du cinéma sur l’artiste. Il dit d’ailleurs envisager les paysages désertés qu’il peint « comme un repérage pour un hypothétique film », mais que leur fragmentation rend tout montage impossible et que « toute fiction s’évanouit ». Point de nostalgie toutefois, seulement de l’inquiétude. – titre de son exposition chez Isabelle Gounod. « Pourquoi l’inquiétude ? Pour ne pas céder au besoin de consolation », dit-il.