Se cogner au paysage, par Jean-Emmanuel Denave in Le petit Bulletin n°1024, octobre/novembre 2022.

Rideau ! Dans les toiles de Jérémy Liron, on se cogne aux murs, les grilles se ferment sous notre nez, de grandes parois occupent presque tout l’espace du tableau (ah si, là, en haut à droite, un petit pan de ciel !), et mêmes les plantes obstruent tout arrière-plan. Ces vues urbaines issues de déambulations et de nombreuses photographies prises par l’artiste lyonnais cognent, condensent, circonscrivent.
Bien sûr, Jérémy Liron a tiré non seulement le rideau, mais aussi les leçons du modernisme pictural : un tableau c’est d’abord et avant tout un ensemble de lignes, de couleurs, une surface qui représente moins qu’elle ne se présente elle-même. L’abstraction sourd à tous les coins de rue peints par Liron (Mondrian notamment dans l’un de ses paysages les plus récents), mais, en-deçà, c’est à Manet que l’on pense beaucoup… Le Manet des natures mortes ou de la Gare Saint-Lazare, où la frontière entre figuration et abstraction devient infime, réversible. Les toiles de Liron sont des concentrés (de réalité, de picturalité, et aussi de fantaisies personnelles discrètes), des intensités. Il expose dans la galerie-appartement Le Cloître Art Contemporain, en compagnie de Frédéric Khodja qui y présente sa très belle série récente Rose and Blue.