Plus que quelques jours pour aller voir cette exposition de Jeremy Liron qui nous apprendra à lever les yeux vers ces grands pins qui sont partout l’empreinte du paysage méditerranéen. Ce qui me frappe à chaque fois dans ses paysages, c’est cette impression que le bleu du ciel, en apparence inerte, n’est pas un simple arrière-plan ou un simple à-plat sur lequel viendraient se découper la dure géométrie des troncs et des canopés. Non, le bleu du ciel transperce partout les branches ; la lumière blanche, méditerranéenne, aveuglante, irradie l’écorce rouge, une écorce dont il est peut-être le seul peintre à savoir saisir la palette et la matérialité, ce puzzle aux mille reflets, et partout les ombres jouent, bleues, vives, encore tremblantes, à peine figées dans la torpeur de l’été éternel. On pense à Hopper, bien sûr, dont il connait la science des contrastes et l’art de saisir l’étrangeté de l’instant. On pense à Kirbeby pour l’alchimie des couleurs et l’implacable géométrie. On pense aux grands maîtres japonais pour la grâce et l’élégance du dessin. Quant à ses agaves, elles ont quelque chose de l’animal, on croirait que leur écorce est une peau d’iguane, toute tendues qu’elles sont dans leur effort de capter cette lumière zénithale, on les entendrait presque pousser, repousser comme ce pin à la cambrure étudiée ce cadre trop serré qui les contraint.

Emmanuel Ruben